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Journées européennes du Patrimoine 2024

Le samedi 21 septembre 2024, Kronos vous propose deux animations :

Hameau et marais de Braille

Balade d’une durée de 2h, commentée par René Canet pour la partie histoire locale et par Marius Bonhomme pour la faune et la flore.
Départ à 14h du parking de Braille

Prévoir chaussures adaptées à la météo du moment et se munir de jumelles.
Inscription conseillée contact@kronos-albanais.org

Espace Patrimoine

Entre 14h et 18h, visite commentée des collections locales, du passé préhistorique à la vie paysanne et industrielle du siècle dernier, en passant par le passé romain.

Présentation du livre « Couronnement de la Rosière à Albens – Une tradition unique en Savoie, Évolution de la condition féminine (1922-2022) » à l’occasion de sa publication.

Entrée libre

Ronde des fours 2024

Ce dimanche, c’est la ronde des fours !
Nous serons présents à Dressy à quelques mètres du four du village, à côté du poste de travail à ferrer les bœufs et de la chapelle. Nous évoquerons l’évolution du travail de « pédicure bovine » entre ce poste de travail et ce qui se fait aujourd’hui.

Également une présentation de la chapelle et de son autel ainsi que quelques faits de l’histoire du village.

Ce sera également l’occasion de vous présenter notre dernier livre paru, sur les 100 ans des rosières à Albens, mais également notre dernière revue 2024, ainsi que certains de nos numéros évoquant le village de Dressy.

À dimanche !

Albanais 1900 – Vivre à la Belle Époque et les nuées de la guerre

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Dans l’Albanais à la Belle Époque

Vivre à la Belle Époque

LA SAVOYARDE

Lorsque j'avais vingt ans, à l'aube des dimanches
Ivre de joie et d'air, j'aimais à m'isoler
Du vain monde en allant, comme autrefois, fouler
Les champs où le ceuillais marguerites et pervenches.

Dans mes courses j'avais le plaisir de parler
À quelque femme ayant coiffe en dentelles blanches
Sur son fichu le cœur et la choix d'or ; des hanches
Prises par un jupon qui semblait les mouler…

Savoyarde d'antan, oh ! qu'es-tu devenue ?
Ainsi que tes atours et leur grâce ingénue
De ton corps faisant mieux ressortir la beauté.

Les filles de nos jours dédaignant le costume
Cher aux temps disparus, dans mon cœur attristé
Je sens grandir, hélas ! le regret, l'amertume.
J.-M. HÉRITIER.

71 Costumes de Savoie - Environs de Chambéry et Aix-les-Bains

Souvenirs épars de la vie d’autrefois

« Les garçons comme les filles portaient des robes jusqu’à ce qu’ils soient propres.

Le dimanche c’était le jour du Seigneur. Ma tante et ma grand-mère sortaient leur robe noire et leurs bijoux pour assister à la messe. Grand-père et mes oncles portaient quant à eux toujours le même costume et leur chapeau aussi. L’hiver à la veillée nous étions nombreux, nous triions les noix, les fruits, les pommes de terre qu’on vendait à des ambulants qui passaient chaque semaine devant la maison. Avec l’argent gagné on achetait des vivres, du savon, l’alcool à brûler pour la lampe et le petit réchaud.

La vie était simple, un rien nous faisait plaisir, malgré le manque de confort, il y avait beaucoup d’affection, de tendresse ».¹

La famille Pillet à Pégis (Albens)
La famille Pillet à Pégis (Albens)
On fait le bois (famille Pillet)
On fait le bois (famille Pillet)
J.-B. Pillet et sa fille
J.-B. Pillet et sa fille

Des modes venues de la ville

On pose en costume du dimanche
On pose en costume du dimanche
Les garçons aussi…
Les garçons aussi…

Le goût pour la petite reine, une certaine recherche dans la mise et l’allure. Les hommes ont très tôt abandonné les costumes traditionnels.

Harmonies, fanfares, et sapeurs-pompiers

Avant la Grande Guerre, il existait des fanfares importantes à Albens ou à La Biolle. Dans cette commune, la fanfare reprit de l’importance après 1925 grâce à l’énergique activité du curé Mermoz qui animait d’une main de maître la fanfare « La Gaîté ».

Des corps de pompiers existaient aussi dans les diverses communes du canton. Ils n’hésitaient pas à conjuguer leurs efforts au moment d’un sinistre important. L’incendie qui détruisit, le 14 juillet 1913, une partie des maisons qui bordent la place publique de Saint-Félix ne fut circonscrit que grâce aux efforts des pompes de Saint-Félix, d’Alby, d’Héry, de Saint-Girod, d’Albens et de Bloye.

« La gaîté » autour du curé Mermoz (La Biolle)
« La gaîté » autour du curé Mermoz (La Biolle)

Le temps des grands repas

La batteuse à Saint-Ours
La batteuse à Saint-Ours

L’arrivée de la batteuse était un moment important de la vie paysanne. Elle signifiait à la collectivité villageoise la récompense du long travail commencé l’année d’avant.

Un repas dans la cour de la ferme
Un repas dans la cour de la ferme

Mobilisant toutes les générations, elle donnait lieu à d’importants rassemblements où « pendant plusieurs jours, dans un travail collectif, on vivait dans la poussière et les débris végétaux ».²

Tout comme les hommes autour de la machine, les femmes s’activaient autour des fourneaux. Une véritable compétition gastronomique s’ouvrait alors pour faire de ces repas de véritables banquets plus que copieux : « Le repas, prévu depuis longtemps par la maîtresse de maison, selon des règles immuables, réunissait autour d’une table souvent montée avec des tréteaux et des planches accompagnées de bancs, tous ces ouvriers d’un jour.

Le service était certes, simple, mais correct, la réputation de chacun étant en jeu… Le rouleau salé de porc, fleuron de l’art culinaire de ces agapes, servi en entrée, était suivi de légumes de saison, de viandes et de fromages. Le tout, bien évidemment, très arrosé de vin rouge provenant des vignes que chaque petit propriétaire cultivait soigneusement, plutôt que ce vin de marchand cher et trop alcoolisé qui coupait les forces ».³

Une fête de la batteuse perpétue chaque été à Saint-Ours le souvenir de ces réunions paysannes estivales.

Les nuées de la guerre

La classe d'Alby 1910 sur le Pont Neuf
La classe d’Alby 1910 sur le Pont Neuf
RECRUTEMENT MILITAIRE. -- Classe de 1900. -- Itinéraire du Conseil de révision.

Nous, PRÉFET DU DÉPARTEMENT DE LA SAVOIE, Officier de la Légion d’honneur.

Itinéraire du Conseil de révision


SÉANCES                 DATES DES OPÉRATIONS        HEURES ET LIEUX
                                                    DES OPÉRATIONS
                                                    (heure légale)
1 Étrangers au dépt     Vend. 19 avril               9 h, du m. dans la salle d’audience du cons. de préfect,
2 Montmélian            Samedi 20 avril              8 h. du matin, à la mairie.
3 Aix- les-Bains        Lundi 22 avril               8 h. du matin,     id.
4 Ruffieux              Mardi 23 avril               2 h. du soir,      id.
5 Albens                Merc. 24 avril               8 h. du matin,     id.
6 La Rochette           Jeudi 25 avril               8 h. du matin,     id.
7. Chamoux              Vend. 26 avril               9 h. du matin,     id,
8 La Motte-Servolex     Samedi 27 avril              9 h. 1/2 du matin, id.
9. Yenne                Lundi 29 avril              10 h. 1/4 du matin, id.
10. Saint-Genix         Mardi 30 avril              11 h. du matin,     id.
11. Pont-Beauvoisin     Merc. 1er mai                8 h. du matin,     id.
12. Les Echelles        Jeudi 2 mai                  8 h. 1/2 du matin, id.
13 Le Châtelard         Vend. 3 mai                  9 h. 1/4 du matin, id.
14 St-Pierre-D'Albig.   Samedi 4 mai                 8 h. du matin,     id.
15 Chambéry - Nord
   et ajournés.         Lundi 6 mai                  9 h. du matin,     id.
16 Beaufort             Mardi 7 mai                 11 h. du matin,     id.
17 Moûtiers             Merc. 8 mai                 10 h. du matin,     id.
18 Bourg-St- Maurice    Jeudi 9 mai                 10 h. du matin,     id.
19 Aime                 Vend. 10 mai                 8 h. 1/2 du matin, id.
20 Bozel                Samedi 11 mai                8 h. du matin,     id.
21 Chambéry - Sud et
   ajournés             Lundi 13 mai                 9 h. du matin,     id.
22 Ugenes               Mardi 14 mai                 9 h. 1/2 du matin, id.
23 Albertville          Merci. 15 mai                8 h. 1/2 du matin, id.
24 Grésy-sur-Isère      Vend. 17 mai                 8 h. 1/4 du matin, id.
25 Aiguebelle           Samedi 18 mai                8 h. du matin,     id.
26 La Chambre           Lundi 20 mai                 2 h. du soir,      id.
27 St-Jean-de-Maur.     Mardi 21 mai                 2 h. du soir,      id.
28 Saint-Michel         Merc. 22 mai                 2 h, 1/2 du soir,  id.
29 Modane               Jeudi 23 mai                 8 h du matin,      id.
30 Lanslebourg          Vend. 24 mai                 9 h. du matin,     id.
31 Ajournés et clô-
   ture des listes.     Mardi 11 juin                9 h. du m., dans la salle d'au-
                                                       dience du cons. de préfect.


Art. 11. - Le présent arrêté sera publié et affiché dans toutes les communes du département ; il sera, en outre, inséré au Recueil des actes administratifs.
Fait à Chambéry, le 12 mars 1904.
Le Préfet de la Savoie,
A. du GROSRIEZ.
Itinéraire du conseil de révision, classe 1900

Être conscrit

La conscription remonte à la Révolution Française avec l’institution du service militaire.

Au XIXe siècle, elle donne lieu dans les campagnes à une véritable cérémonie de la part du contingent annuel de jeunes appelés qui s’emploient à « faire les conscrits ». « Les conscrits de l’année se réunissaient généralement le dimanche précédant le jour du conseil de révision, avec ceux de l’année suivante pour leur remettre le « crochon », c’est-à-dire les préparer à accomplir un acte de la vie que leurs aînés étaient en train de vivre. Ce rite était identique, dans l’esprit tout au moins, à la remise du « crochon » lors des mariages. Un banquet clôturait cette journée ».

Le jour du conseil de révision, les conscrits portaient leurs habits du dimanche. Il était très mal vu d’être réformé ; faire son service était un devoir mais aussi un honneur.

La Biolle : les conscrits de 1906
La Biolle : les conscrits de 1906

À l’issue du conseil, les conscrits du village se regroupaient souvent avec ceux des communes voisines pour partir faire une tournée. Ils arboraient alors toute une décoration chamarrée de cocardes, rubans ou ceintures.

Les Albanais dans la guerre

Ils partiront nombreux à la guerre de 1914-1918. Ceux qui survivront, en garderont d’amers souvenirs : « nous avons passé de sales moments, raconte L. Perroud en 1980, surtout au « chemin des Dames » et à Reims. On a perdu des troupes et du matériel, au « chemin des Dames », nous n’étions pas nombreux en ligne. Nous étions installés sur une crête. Nous sommes restés un mois en ligne sans que personne ne nous relève… Une fois, dans l’Aisne, nous sommes restés quatre jours sans manger, le ravitaillement n’arrivant pas. »

Ceux qui en revinrent ont pu se rattraper lors du banquet donné en leur honneur, le 5 octobre 1919 à Albens. Ils retrouvaient un monde bien changé : celui du XXe siècle.

Albens : les conscrits de la classe 1908
Les campagnes d'un poilu d'Albens
Les campagnes d’un poilu d’Albens
BANQUET DU RETOUR DES POILUS DE LA COMMUNE D'ALBENS

HORS-D'ŒUVRE
MELON
ANCHOIS A LA RUSSE
CERVELAS --- BEURRE

OMBRE-CHEVALIER SAUCE VÉNITIENNE
FILET DE BŒUF RICHELIEU
LIÈVRE SAINT-HUBERT
CHOUX-FLEURS CHANTILLY
POULETS DE GRAINS
SALADE PORTUGAISE

DESSERT
PIÈCES MONTÉES * FROMAGE
CORBEILLE DE FBUITS

CAFÉ * LIQUEURS
VINS A VOLONTÉ

ALBENS, LE 5 OCTOBRE 1919.
Banquet du retour des poilus de la commune d’Albens

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¹ D’après les souvenirs de Rolande Ray.

² Henri Blanc. Moisson de souvenirs : La batteuse. Le Dauphiné.

³ La batteuse. Les amis du vieux Rumilly. N° 8. 1990.

M. Germain. La Haute-Savoie Autrefois. Ed. Horvath.

Louis Perroud raconte la Grande Guerre. Kronos ° 1.

Femmes et hommes dans la Résistance en Savoie, Exposition à voir et à réserver

Intitulée « Femmes et hommes dans la Résistance en Savoie », cette exposition composée d’une douzaine de panneaux est le résultat d’un projet collectif mené par quatre étudiant et étudiantes, sous la direction de Corinne Bonafoux, maîtresse de conférences à l’Université Savoie Mont-Blanc.

Remise de décoration à Marie Pétellat
Remise de décoration à Marie Pétellat

Ce groupe, composé de Lucille Maurel, Clara Mazin, Lucas Papadellis, Amandine Tercero, avait rencontré notre association lors de leur travail préparatoire il y a plus d’un an.

 Paulette Besson, déportée pour fait de résistance
Paulette Besson, déportée pour fait de résistance

À cette occasion, nous avions parlé de quelques figures locales dont Marie Pétellat (Kronos n° 38) et Paulette Besson. Des exemples qui figurent en bonne place dans cette exposition qui leur a été commandée par l’Office National des Anciens Combattants et des Victimes de Guerre (ONaCVG).

Cliché DL – Guy Jacquemard
Cliché DL – Guy Jacquemard

Mardi 18 juin, dans le grand salon de l’Hôtel de ville de Chambéry, avait lieu la présentation de l’exposition qui a pour vocation de circuler dans tous les établissements scolaires de Savoie (collège et lycée). Les enseignants qui souhaiteraient recevoir cette exposition dans leur établissement doivent la réserver sur le site de l’ONaCVG de Savoie.

Dans le salon de l'Hôtel de ville de Chambéry
Dans le salon de l’Hôtel de ville de Chambéry

Nous sommes ravis d’avoir pu assister à la présentation de ce travail par ce groupe dynamique d’étudiant et étudiantes et souhaitons « bon voyage » à cette exposition bien documentée et largement illustrée.

Jean-Louis Hébrard

Albanais 1900 – Les tuileries, l’industrie fromagère et les écoles

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Dans l’Albanais à la Belle Époque

Tuileries et industrie fromagère

Principale activité industrielle dans l’Albanais, la fabrication des tuiles prend véritablement de l’ampleur dans les années 1880. À cette date, Joseph Poncini (venu quelques années plus tôt du Tessin en Suisse) est installé vers Braille. Il y a découvert un bon filon d’argile et construit de ses propres mains sa tuilerie. Au début du siècle, elle emploie une centaine d’ouvriers d’origine locale principalement.

« À cette époque, tout était fait à la main, voire même avec le pied puisque c’est ainsi que la terre est pétrie. Les chevaux servaient à remonter la terre de la poche, à transporter les briques ou les tuiles à la gare d’Albens ou encore à livrer les clients des environs avec des chariots équipés de roues à bandages ».¹

L’entreprise se mécanise vraiment après 1911 lorsqu’une machine à vapeur est installée dans l’entreprise.

Une grande cheminée, haute de quarante mètres environ, marquera désormais le paysage industriel local.

Une locomotive à vapeur, la Routière, remplace les chevaux pour le transport des tuiles vers la gare d’Albens. La tuilerie achemine l’essentiel de sa production dans les deux départements de Savoie et Haute-Savoie ainsi que dans le Jura.

À Saint-Félix, la principale industrie de la commune réside dans deux importantes fruitières. En 1885, Louis Picon a installé une entreprise d’affinage d’emmental qu’il nomme « Fromageries Picon ». Elle sera appelée à prendre une importance considérable après la Grande Guerre.

En dehors des industries de transformation des produits agricoles on trouve à Saint-Félix un certain nombre de brodeuses travaillant à domicile pour la maison de mode parisienne Maillet et Anquetil. Il y a surtout les moulins actionnés par l’eau détournée du Nant d’Orsan ou par celle de la Deysse à sa sortie des étangs de Crosagny. Grâce aux martinets mus par la force hydraulique deux forges travaillaient le fer dans les années 1900.

« Les maîtres de forges, tels les Burdet, faisaient venir des barres de fer des grands centres fournisseurs comme Allevard ou St-Chamond… Les barres étaient divisées, coupées dans la masse pour donner naissance à toutes les taillanderies : cognées, coins de bûcherons, scies, haches, serpes, faux ».² Bon nombre de ces objets étaient ensuite vendus sur les foires d’Aix, de Cusy, de la Biolle et de Saint-Félix.

À l’école

Environs d'Albens. -- Cessens (Savoie) 689m. -- La Mairie, les Écoles
Environs d’Albens. — Cessens (Savoie) 689m. — La Mairie, les Écoles

Les groupes scolaires

C’est surtout vers l’instruction publique que la IIIe République a dirigé ses efforts.

La loi de 1882 établissait la gratuité de l’enseignement primaire. Dès 1883, l’État vient en aide aux communes pour la construction de leurs écoles.

Il ne lésinera pas sur les moyens et les réalisations seront à la hauteurdes ambitions affichées.

C’est ainsi que Saint-Félix obtint en 1883 une subvention de 75 000 francs pour construire un magnifique groupe scolaire « comprenant deux classes pour les garçons et deux pour les filles avec logements pour les quatre maîtres ».³

La commune eut recours aux services de l’architecte Ruphy et à ceux de A. Chanlansonnet, entrepreneur à la Biolle pour les travaux.

Il en va de même dans l’ensemble du département de Savoie où 864 écoles publiques furent construites à l’usage de 44 000 écoliers (statistiques de 1910).

Albens inaugure ainsi en 1882 son groupe scolaire pour les deux sexes avec six instituteurs, deux titulaires et quatre adjoints.

En passant par la cantine

Le photographe était-il là, ce 2 décembre 1901, pour l’ouverture de la première cantine scolaire en Savoie ?

Toujours est-il que la commune de La Biolle innove en ce domaine. « La raison en est certainement l’habitat dispersé qui à une époque où les voitures n’existaient pas en grand nombre, a fait d’une cantine une nécessité. Elle dénote aussi, déjà à cette époque un certain dynamisme. Un grand bien pour l’école qui n’a pas vu la population scolaire des villages périphériques émigrer vers les communes voisines ».

Vive la république

Comme tout le monde en Savoie, ces jeunes élèves de l’école de La Biolle se félicitent du grand effort fait par la Troisième République pour donner l’instruction au peuple.

Les résultats sont très encourageants au niveau départemental puisque « dans la dernière statistique publiée par le ministère de l’Instruction publique (1901), le département occupe le dixième rang avec une proportion de 98,9 % de jeunes gens appelés sous les drapeaux et sachant lire et écrire. ». Il n’est aucun village de l’Albanais qui ne fasse régulièrement le point sûr la fréquentation scolaire et n’affiche les résultats de ses ouailles au « certif ». L’instituteur de Saint-Félix n’y manque pas, précisant que « depuis que le certificat d’études primaires a été institué, 132 garçons et 125 filles ont obtenu ce diplôme, et une bonne partie de ces jeunes gens ont complété leurs études par une ou plusieurs années d’école primaire supérieure. Dix garçons et quatre jeunes filles sont entrés dans l’enseignement primaire ».³

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¹ La tuilerie Poncini. Kronos n° 2.

² Les Amis des Moulins savoyards. N° 4 mars 1990.

³ M. Girod. Histoire de Saint-Félix.

L’Agriculteur Savoyard. Avril 1990.

F Christin et F Vermale : Abrégé d’Histoire de la Savoie, 1913.

Table ronde autour de l’arbre et de l’agroforesterie

Le samedi 4 mai 2024, l’association Cyclamen organisait à la salle polyvalente d’Héry sur Alby une table ronde regroupant divers acteurs professionnels et associatifs. Kronos y était présent, en la personne de Denis Berthet, pour parler de la culture fruitière autrefois et de l’histoire de la forêt. Celui-ci rappela l’importance du châtaignier, arbre nourricier de l’Albanais qui permettait aux paysans de s’alimenter de mi-octobre à la fin mai. Il évoqua ensuite les vergers dans l’Albanais et les Bauges et la fabrication du cidre et de la gnôle, pour terminer avec l’histoire la culture fruitière.
La seconde partie de l’intervention concernait l’histoire de la forêt savoyarde. On remarque la très grande importance en surface de la forêt communale à l’époque du cadastre sarde de 1732 par rapport à celle de la France. Les forêts savoyardes fournissent le bois nécessaire à la cuisson des aliments et au chauffage restreint à la pièce de vie, mais accueillent aussi les vaches, les cochons et les chèvres ce qui amoindrit le renouvellement de la forêt.
À partir de 1860 la Savoie devient française et c’est l’administration des Eaux et Forêts qui gère les bois, en très grande partie communaux. Cette administration avait deux objectifs contradictoires : développer la richesse en bois et éviter d’irriter les populations. Si les premières années furent conflictuelles avec de très nombreux PV, avec le temps les forêts furent délimitées et bornées. Des règlements de coupes ont été créés et acceptés.
En 1882 c’est la création du service Restauration des Terrains en Montagne (RTM). L’Etat achète beaucoup de terrains près des torrents pour prévenir les inondations (correction torrentielle). Les forestiers font ainsi travailler tous les paysans des montagnes.
Après 1945 le rôle du bois de chauffage diminue très rapidement et la venue de la mécanisation et d’autres techniques amènent à la création de l’Office National des Forêts, remplaçant les Eaux et Forêts qui auront duré sept siècles. Au même moment les propriétaires privés bénéficient de la création du Centre Régional de la Propriété Forestière (CRPF) pour gérer leur forêts.
Suite à ce petit exposé, le journaliste Mr Baudin, qui faisait office de modérateur, a posé plusieurs questions pour animer le débat avec le public avant de passer la parole aux autres intervenants.

Denis Berthet

Albanais 1900 – Le train et le tourisme

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Dans l’Albanais à la Belle Époque

Le train de 8h30 pour Annecy

La ligne de chemin de fer Aix-les-Bains-Annecy est inaugurée en 1866 par le ministre de l’Agriculture, du Commerce et des Travaux Publics.

Le cortège officiel, nous apprend la presse du moment, « a quitté Aix-les-Bains à 11 heures et demie du matin après avoir reçu les invités de la Savoie et de l’Isère.
À Albens, M. le Ministre a été complimenté par le maire. À Rumilly, le train a fait un arrêt de 30 minutes. Les sapeurs-pompiers étaient sous les armes et rangés en lignes sur le quai de la gare. La ville était pavoisée et la population tout entière saluait par de chaudes acclamations le représentant de l’empereur
. »¹

Horaire du chemin de fer. — Section d’Aix-les-Bains à Annecy et de Chambéry à Grenoble.
Journal Le Mont-Blanc, 1866, n°81 et suivants. Archives départementales de la Haute-Savoie.

C’est le P.L.M., chargé de la réalisation de la voie ferrée, qui adoptera le tracé par Albens et Rumilly, plus long mais desservant mieux les localités importantes.

Nombreuses ont été alors les communes souhaitant voir une station sur leur territoire ; Grésy, Albens, Bloye obtinrent satisfaction, mais La Biolle, émue de ne pas être desservie par le rail, déposa une requête qui resta sans réponse.

Avec l’ouverture de cette voie, l’Albanais se trouvait désenclavé. Il allait être désormais plus facile de se rendre dans les villes voisines comme dans celles plus lointaines de Lyon ou Marseille.

Des modifications économiques importantes allaient en découler (nouvelles cultures, mouvements migratoires…) qu’un discours prononcé alors résume en ces termes : « Cette voie, prompte et facile, sera un nouveau lien avec la France, une source féconde de richesse par l’échange de tous les biens et de tous les produits. Ce n’est plus l’annexion, c’est la fusion, c’est la communauté de vie et d’intérêts. »

Aux premiers temps du tourisme

Délaissées à cause de l’engouement pour les chemins de fer et les tramways, les routes vont retrouver, au début du siècle, un regain de ferveur et d’utilité grâce à la bicyclette et à l’automobile.

On s’aperçoit alors avec stupéfaction de l’immense labeur qui s’était accompli durant les dernières décennies, mettant en place un véritable réseau de routes départementales ou communales.

Stations thermales ou climatiques, paysages de lacs, curiosité de l’avant-pays, tout était en place pour que la région s’ouvrît à sa vocation touristique.

Les syndicats d’initiative recensent, à l’attention des curistes d’Aix-les-Bains et des amateurs de panoramas, les richesses de l’Albanais.

Promenade dans l'Albanais
Promenade dans l’Albanais

Dans la rubrique « promenades et excursions des environs d’Aix », le Bulletin des syndicats d’initiative de la Savoie ne manque pas de recommander, en 1897, « les cascades de Grésy, les Gorges du Sierroz, dans lesquelles on fait une excursion en bateau à vapeur », mais aussi « La Biolle, Albens, le châlet-hôtel de la Chambotte, qui domine à pic le lac du Bourget, les tours de César (châlet-hôtel), la vallée du Sierroz qui se continue à travers les Bauges par la vallée du Chéran ».

Les riches possesseurs d’une automobile n’hésitent pas à faire le voyage, encouragés par les excellentes informations sur l’état de la route : « bonne mais étroite entre la Biolle et Rumilly ; bonne également de Saint-Germain au village de La Chambotte, très bonne de la Croix du Sable à Albens ».² Et même si on signale une route « très médiocre du village : de La Chambotte au restaurant », l’attrait du belvédère l’emportera.

Hôtels et pensions de famille s’ouvrent à La Biolle, Albens ou Saint-Félix. Les maisons Garbolino, Goury, ou Grange de La Biolle misent sur les ressources gastronomiques de la commune, tandis que la maison Anquetil de Saint-Félix insiste sur le confort moderne de ses installations.

À propos d’automobiles
VITESSE !
L’Académie vient, paraît-il, de prendre une décision grave.
Elle a décrété que l’automobile serait du masculin.
Il y avait sur le genre de ce mot une discussion qui ressemblait à la querelle des gros-boutiens et des petits-boutiens.
Rendons cette justice à l’Académie que sa décision est conforme au bon sens ; car enfin, si mobile, le radical du mot, est masculin, on ne voit pas pourquoi automobile serait d’un autre genre. Beaucoup de gens s’obstinaient cependant dans une opinion contraire. Les voilà désormais condamnés ; ils ne s’en portent, d’ailleurs, pas plus mal, et le genre du mot automobile leur est certainement léger.
Une querelle semblable s’est engagée, il y a quelques années, sur la question de savoir s’il fallait dire : aller en bicyclette ou à bicyclette. Le simple bon sens indiquait que la première façon de s’exprimer devait être vicieuse. On dit, en effet, aller en voiture, en wagon, en tramway, parce que ce sont là des récipients qui peuvent nous contenir. Mais une bicyclette n’a jamais renfermé personne, pas plus, d’ailleurs, qu’un âne ou un cheval, sauf le fabuleux cheval de Troie qui fait plus honneur à l’imagination des poètes qu’à leur souci de la vraisemblance ; car on voit mal des bataillons entiers prendre place dans les flancs d’une machine de ce genre, fût-elle grosse comme une montagne : montis instar, selon l’expression de Virgile.
Donc, pour en revenir à nos moutons, voilà le mot automobile doté d’un genre — ce qui devenait indispensable étant donné l’énorme usage qu’on en faisait depuis quelque temps.
L’automobilisme tend, en effet, à détrôner le cyclisme. Aller à bicyclette présente un inconvénient grave pour la jeune génération à cheval sur la fin du siècle qui s’achève et sur le début de celui qui commence. Il faut remuer les jambes, il faut pédaler, selon le mot consacré. Or, ce mouvement implique une fatigue qui ne cadre évidemment pas avec les tendances plutôt nonchalantes de ces petits jeunes gens. Avec l’automobilisme, on brûle les distances sans mouvement ni fatigue. Voilà le dernier cri de ta locomotion !
Nos villes d’Eaux ont vu, ces années dernières, s’épanouir toute une floraison de cyclistes, hommes et femmes, qui a duré un peu plus que les roses, mais qui penche vers son déclin. Ce n’est pas que la bicyclette soit en défaveur ; mais la faveur dont elle a joui diminue. L’engouement passe. Il se porte vers l’automobilisme. Les grandes routes des environs de nos villes d’Eaux sont sillonnées de machines qui font un train d’enfer, qui répandent une odeur nauséabonde, qui écrasent des oies, des chats et des chiens, qui soulèvent des nuages de poussière, qui cornent, qui ronflent et qui secouent, comme des paniers à salade, les mortels emportés dans cette trombe. On trouve cela beau. On trouve cela commode et charmant. C’est la dernière production du génie qui nous entraîne avec une vitesse vertigineuse vers un avenir inconnu. Qu’inventera-t-on ? Que n’inventera-t-on pas ? On inventera tout, sauf le secret d’être heureux en ce bas monde.
P. BEAUMONT.

Journal Le Progrès d’Aix-les-Bains, septembre 1900. Archives départementales de la Haute-Savoie.

Un « must » du circuit touristique

Les moulins de Grésy-sur-Aix et les gorges du Sierroz que l’on descend en bateau à vapeur (le Christophe Collomb, du nom de famille du propriétaire) attirent en été une importante clientèle de curistes. Ils viennent frémir à l’évocation du tragique accident qui coûta la vie, sous l’Empire, à Mme de Broc, cette très belle dame de compagnie de la reine Hortense. Devant le « trou de la Beurrière », le guide ne manquera pas de parler de la planche glissante, de l’impuissance du meunier Pierre Rey et de l’écharpe flottant sur l’écume.

La Biolle fait sa publicité
Dans les gorges du Sierroz

Sur les traces de la reine Victoria

« Le Belvédère de la Chambotte fit ses premiers pas dans l’histoire en 1882. Un banquier d’Albens, C. Favre, décida alors d’y construire un bâtiment destiné à recevoir un cercle dont on ne connaît pas les particularités.

Terminé en 1884, l’établissement fit faillite au bout de deux ans, en 1886. La Banque Commerciale d’Annecy, principal créancier, confia alors la gérance à M. L. Lansard et son épouse, Mary Killing Robertson, une Écossaise… qui apportait avec elle une spécialité gastronomique… les scones.

Les époux Lansard tinrent la gérance de l’hôtel jusqu’en 1891 et en devinrent propriétaires en 1892, date à laquelle ils firent construire la route qui conduit du village de la Chambotte jusqu’au Belvédère, dans le même temps qu’était entreprise celle reliant Chaudieu en Chautagne jusqu’au même village. »³

C’est la venue de la reine Victoria, en 1887, qui allait donner au Belvédère une renommée internationale.

« Elle était dans un landau traîné par plusieurs chevaux, et une chaise à porteurs lui permit de franchir les dernières centaines de mètres… Sur le chemin, à la traversée de La Biolle… la reine s’était arrêtée quelques minutes pour recevoir l’hommage d’un très jeune admirateur. M. Laurent lui remit un bouquet. En guise de remerciement, elle lui donna un louis d’or qu’il garda précieusement. »

Elle apprécia hautement l’accueil de Mary Killing Robertson qui lui offrit des scones. Quelques temps plus tard, la reine fit parvenir aux Lansard sa photo et celle de sa fille dédicacées. Dès lors, le Belvédère ne cessera plus de recevoir des personnalités. Un livre d’or conservera jusqu’à nos jours les traces de ces prestigieux passages.

Les clients arrivaient à la Chambotte en voiture à chevaux par La Biolle, Albens ou Saint-Germain. Une écurie (chez M. Georges Arbarète) accueillait les bêtes. Depuis là, les promeneurs pouvaient gagner le Belvédère à pied, en empruntant les chemins et sentiers muletiers existants. « J’use sans regrets ma botte, en montant à la Chambotte » écrivit alors J. Richepin.

D’autres moyens plus originaux étaient à leur disposition : de petits ânes ou des chaises à porteurs.

Ces instruments de transport procuraient une activité aux gens du village. I| en coûtait trois francs aux touristes pour se faire transporter du village au Belvédère. Nombreux étaient les enfants qui guettaient les riches promeneurs pour leur vendre des fleurs ou des marabouts (sorte de panaches duveteux ramassés dans les rochers des environs).

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¹ Journal Le Mont-Blanc, 1866, n° 80, Archives Départementales de la Haute-Savoie.

² Routes de la région savoisienne. Aix-les-Bains et ses environs, 1898.

³ La Chambotte, balcon de l’irréel. Kronos n° 4.

F. Françon. D’Aix-en-Savoie à Axilia. Ed. de Trévoux, 1972.