L’Albanais a toujours été une importante voie de communication. Dès l’époque romaine, les hommes ont reconnu dans cette dépression la liaison naturelle entre la cluse de Chambéry et celle d’Annecy : « Depuis Aix-les-Bains, en remontant le cours du Sierroz jusqu’à Grésy, puis celui de la Deisse jusqu’à Albens, l’accès était facile dans la vallée de l’Albanais, en pénéplaine jusqu’à Rumilly. »¹
Drainée par les deux versants du Chéran au nord et de la Deisse au sud, d’une altitude moyenne variant entre 340 et 600 mètres, la dépression de l’Albanais est limitée à l’est et à l’ouest par un ensemble de contreforts calcaires (Clergeon, Sapenay d’une part, Semnoz – Mont Revard d’autre part) dont les altitudes atteignent 1 000 à 1 500 mètres et qui constituent des belvédères remarqués.
Le cours du Chéran, passage difficile, lui sert de limite septentrionale et le lac du Bourget de limite méridionale.
Ainsi cernée, la vallée de l’Albanais est un espace orienté nord-sud, d’environ trente kilomètres de long et quinze de large.
LE RATTACHEMENT ET SES SUITES
En 1860, dans l’Albanais comme dans la Savoie toute entière, on manifeste massivement à la France en votant pour le rattachement.
Dans les quinze communes qui composent le mandement d’Albens, nombreuses sont celles qui choisissent la France à l’unanimité ; tel est le cas d’Albens, d’Ansigny, de Mognard, de Saint-Germain, de Saint-Girod et de Saint-Ours ; tous les inscrits se déplacent : leurs cœurs allaient bien vers où coulaient leurs rivières.
La province de Savoie se transforme en départements de Savoie et de Haute-Savoie.
Très vite pour l’Albanais, la question se pose de son appartenance aux deux départements. Où faire passer la limite administrative ?
Dans un premier temps, le canton d’Albens, composé de ses quinze communes, se trouvait incorporé à la Savoie. Mais très vite, la guerre, à son propos, fait rage entre les deux départements. Le préfet Petetin en attribue la raison à la « rivalité séculaire qui existe entre Annecy et Chambéry, celle-ci ville de loisirs, aristocratique et cléricale, l’autre active, industrielle et libérale », et la responsabilité aux « hommes d’affaires de Chambéry qui tenaient à réunir autour de leurs cabinets les plus forts éléments de clientèle et en voyaient d’importants dans le riche canton d’Albens ».
L’affaire va monter jusqu’au ministre de l’Intérieur et à l’empereur Napoléon III qui, par décret en date du 20 décembre 1860, va détacher les communes d’Alby, Chainaz, Cusy, les Frasses, Héry-sur-Alby, Saint-Félix du canton d’Albens pour les réunir au département de la Haute-Savoie et au nouveau canton d’Alby.
Cette solution ne faisait pas seulement passer la limite entre les deux départements plus au sud qu’avant, elle illustrait surtout la difficulté à partager un espace dont la vocation est d’être avant tout un trait d’union entre les deux composantes de la Savoie.
POPULATION DES VILLAGES EN 1912 {recensement de 1911) ALBENS : 1 559 habitants. ANSIGNY : 98 habitants. LA BIOLLE : 1 150 habitants. CESSENS : 562 habitants. EPERSY : 311 habitants. MOGNARD : 337 habitants. ST-GERMAIN : 516 habitants. ST-GIROD : 429 habitants. S-OURS : 417 habitants.
Le hasard, le hasard d’une discussion chez Bernard Fleuret,
la volonté, la volonté de deux associations, Kronos et La Biolle Loisirs, de faire revivre un passé pourtant proche et déjà lointain dans beaucoup de mémoires,
la patience, la patience de collectionneur de Pierre Granger, d’Henri Billiez et d’autres personnes qui ont su rassembler ou conserver les précieux documents que vous rencontrerez dans ce livre,
la passion, la passion de votre rédacteur Jean-Louis Hébrard pour l’histoire locale,
nous permettent de vous présenter cet ouvrage collectif retraçant un passé récent de l’Albanais.
Que toutes les personnes qui ont mis à notre disposition des documents ou qui nous ont consacré quelques instants pour nous raconter leurs souvenirs, que celles qui nous ont fait confiance, tels notre imprimeur et nos souscripteurs, reçoivent nos remerciements.
Si malgré nos recherches, il s’est avéré impossible de joindre les ayants droit d’auteurs ou d’éditeurs d’ouvrages, de cartes postales anciennes ou de photos, dont nous avons néanmoins tenu à reproduire certains documents, nous espérons que cette occasion leur permettra de se révéler à nous. « Droits réservés » pour cette catégorie de documents.
La parution des documents de ce livre a suscité l’accord des propriétaires ou des ayants droit desdits documents. Si malgré nos recherches certaines personnes concernées n’ont pas été contactées, nous leur présentons nos excuses.
Albanais 1900 est un livre épuisé, paru en avril 1991 (dépôt légal, ISBN 2-9505656).
Cet ouvrage avait été un travail conjoint de Bernard Fleuret, de Kronos, de La Biolle Loisirs, avec la participation gracieuse de Jean-Louis Hebrard pour le texte.
Vous retrouvez ci-dessous la mise en ligne de ce livre, découpé par chapitres, ou vous pouvez télécharger le livre scanné au format pdf.
Kronos vous convie à son Assemblée Générale qui se déroulera le vendredi 22 mars 2024 à 20h00, à la salle de l’Ébène à La Biolle.
Cette Assemblée Générale sera suivie par une conférence animée par Marius Bonhomme, sur le thème « L’école en Savoie à partir de 1860 », composée d’une projection de film et d’une petite exposition d’objets et de photos sur la vie scolaire.
Au début des années 50, les adultes qui nous entourent, grands-parents et parents, ont traversé les épreuves de la guerre. Tous sortent de la période de restriction liée à l’Occupation. Mentalement, tout le monde connaît la valeur des choses, jusqu’au moindre clou, bout de ficelle, morceau de laine. On sait faire travailler ses mains pour tricoter, coudre, raccommoder. On devient cordonnier quand les chaussures s’usent, menuisier ou soudeur pour effectuer d’innombrables réparations. À la maison, les boites se remplissent de boutons, fermetures Éclair, crochets. Dans l’atelier ou la cabane du jardin, les tiroirs se remplissent de rondelles, vis de tout type, clous mis de côté en raison du : « au cas où, ça peut toujours servir ». C’est le règne des boites.
Pour conserver la semence (petits clous) (collection de l’auteur)
Dans la France du président Vincent Auriol, les anciens combattants de la Grande Guerre sont encore nombreux. Ils se souviennent de ce conflit qui a pris leur jeunesse, les a marqués à vie, leur donnant entre autre la manie étonnante de la récupération. Une rondelle de métal, un bout de pneu ne doivent pas traîner dans la rue ; hop, dans la poche en vue d’un réemploi. Nous, les petits enfants, les regardions étonnés, ne pouvant savoir l’importance que ces « débris » avaient pu représenter pour eux dans les tranchées. Seules les douilles d’obus trônant sur la cheminée conservaient alors la mémoire d’un artisanat effectué à partir des matériaux disponibles sur le front (fusées, douilles, têtes d’obus…). Pierre Raynal, auteur d’une exposition sur l’artisanat des tranchées, écrit : « ces objets métalliques étaient transformés pour donner des briquets, des coquetiers, des bagues ou des boites à tabac… Les outils pour graver, poinçonner, tailler étaient fabriqués eux aussi à partir de matériaux de récupération ». Quant à la génération des parents, elle venait d’être formatée par quatre années de rationnement et savait récupérer de la laine sur un vieux tricot, réemployer la tôle des boites de conserve. En Savoie comme dans le reste de la France, on ne roule pas sur l’or. À la campagne, dans le monde ouvrier, être économe s’impose. Ce mode de vie parcimonieux est rapporté par Jean Bertolino dans Madame l’Étoile. Il raconte son séjour, enfant, dans une ferme du côté de Nances : « La vente du lait […], des céréales et du tabac cultivés sur les huit hectares de la propriété à l’aide de deux bœufs sont les seuls revenus des Richard, juste de quoi renouveler ou entretenir l’outillage, payer les petits frais. Pour le reste c’est l’autarcie. Un carré de vigne fournit le vin de l’année… de la volaille donne les œufs et agrémente les repas de fête ». Dans de telles conditions, on ménage principalement les vêtements et les chaussures. Les hommes possèdent souvent un pied de fer ou enclume de cordonnier. De dimensions réduites (18cm de hauteur sur 16 et 15 cm pour les autres parties) ce petit outil permet le changement des talons mais aussi la fixation de fers pour renforcer le bout de la chaussure et l’arrière.
Enclume de cordonnier (collection de l’auteur)
On se souvient encore du bruit que produisaient ces embouts ferrés ainsi que des glissades qu’ils provoquaient. Pour fixer tout cela, le « cordonnier maison » utilisait de tout petits clous ou semences. Le travail achevé, c’était l’assurance de pouvoir faire durer la chaussure longtemps.
Modes et Travaux (janvier 1952) modèles de tricots (collection de l’auteur)
Outre la couture et le raccommodage, les mères de famille pratiquaient le tricot. À l’époque, il redevient plus facile de commander des pelotes de laine. Les marques ne manquaient pas, telles Bergère de France, Phildar, Pernelle, Laines du Chat botté. La laine restant encore précieuse, cette dernière marque avançait l’argument qu’avec elle on pouvait « tricoter plus avec moins de pelotes ». Mais avant de faire la commande, on cherchait à récupérer la laine des anciens tricots, cache-nez et autres gilets. Ce travail s’effectuait toujours selon des étapes bien rodées. On détricotait puis on lavait la laine à bonne température avec une lessive adaptée. Le séchage demandait ensuite des soins attentifs pour conserver à la laine ses qualités. Quand tout avait séché, arrivait enfin la mise en écheveau. Enfant, on était heureux de participer à leur confection. Il fallait tendre les bras, bien écartés pour qu’on puisse enrouler le fil de laine. L’écheveau terminé, il ne restait plus qu’à tricoter à nouveaux en mélangeant les pelotes, les couleurs et les motifs. Cela donnait des assortiments improbables portés malgré tout avec bonheur quand le froid revenait. Les revues fourmillent alors de modèles pour tous les âges. Pour équiper bébé, étaient proposés la brassière, la barboteuse, le paletot réversible et le bonnet. Les plus grands avaient le gilet. Pour cela, il fallait puiser dans la boite à boutons. Toutes les familles en possédaient une dans laquelle dormaient tous les systèmes de fermeture et de boutonnage récupérés au fil des ans sur tous les vêtements usagés.
Boutons et fermetures éclair (collection de l’auteur)
L’on ne parle pas alors de recyclage, c’est plutôt le binôme récupération et bricolage qui domine les esprits. Dans tous les foyers il y a un bricoleur en action, une personne qui est capable d’étamer les casseroles, de changer les plombs fondus dans les tabatières du tableau électrique ou de confectionner des charnières avec des morceaux de pneumatique. Ce personnage est chanté avec beaucoup d’humour par Patachou sur un texte écrit en 1952 par Georges Brassens. Tout le monde connaît alors le refrain « Mon dieu quel bonheur, mon dieu quel bonheur, d’avoir un mari qui bricole, mon dieu quel bonheur, mon dieu quel bonheur, d’avoir un mari bricoleur » et sa chute « boite à outil, boite à outil ». Le règne du système D qui dominait dans les années 50 revit peut-être aujourd’hui à travers la multiplication des « tutoriels » sur internet.
KRONOS vous invite à une conférence sur le thème :
Charles Emmanuel le Grand et l’Escalade de Genève
Par Bernard Juillet, membre de Kronos.
Vendredi 12 janvier à 20h, à l’espace patrimoine d’Albens, 177 rue du Mont-Blanc, Albens, 73410 Entrelacs
En décembre 1602, les habitants de Genève repoussèrent les troupes du duc de Savoie qui tentaient de prendre d’assaut les murailles de la ville pendant la nuit. Depuis, une fête annuelle populaire est l’occasion de célébrer la résistance de la ville et d’exprimer la persistance du sentiment d’identité locale.
Charles Emmanuel qu’on appelle quelquefois « le Grand » est un personnage fascinant. Diplomate, guerrier, poète, il personnifie le prince idéal de la Renaissance. Mais son action politique est plus controversée. Dans une Europe ravagée par les guerres de religions, il a tenté de faire exister son petit État à travers des défis militaires et politiques qui n’ont pas toujours abouti, heureusement. L’épisode de l’Escalade de Genève sera l’occasion d’évoquer l’histoire de la Savoie au XVIème siècle et les transformations qui poussèrent le Duché à transférer sa capitale de de Chambéry à Turin.
Dans le cadre du Téléthon 2024, Kronos vous propose une découverte guidée du petit patrimoine religieux. Partant le samedi 9 décembre à 10h devant le centre administratif d’Albens, l’itinéraire ira de la Rippe à l’Espace Patrimoine, en passant par la rue Joseph Michaud.
Les dons (2€) seront reversés au Téléthon.
De plus, l’Espace Patrimoine sera ouvert, de 10h à 12h et de 14h à 16h. N’hésitez pas à venir visiter nos collections !
Jeudi 19 octobre après-midi, nous participions à la séance de restitution d’un projet intergénérationnel lancé sous l’égide de la commune d’Entrelacs, du service lien social et de l’école l’Albanaise (classes de CP/CE1 de Mmes Eynard et Moggi).
Les élèves ont d’abord suivi les animations audiovisuelles réalisées par JL Hebrard (power-point « l’école autrefois ») et René Lambert (rencontres filmées entre Yolande Chautemps, René Canet et les jeunes élèves qui leur posent de multiples questions). Dans la salle Chantal Mauduit, le public (anciens et parents) était venu en nombre.
Au temps de « l’audiovisuel » allait succéder la découverte des nombreux ateliers consacrés aux objets d’autrefois, aux livres scolaires anciens, mais aussi à la découverte de métiers anciens (fabrication de fourches et râteaux, tressage de paniers proposés par des anciens de Saint-Offenge).
L’atelier d’écriture à la plume sergent major proposé par Kronos a connu un large succès auprès de tous les jeunes élèves, qui se sont appliqués à produire de belles lettres majuscules ou à écrire leurs prénoms.
Avant le goûter offert par la commune, les élèves ont interprété « la laine des moutons », un chant appris en classe avec Yolande.
Une belle expérience qui pousse à remercier toutes celles et ceux qui s’y sont impliqués d’une façon ou d’une autre.
Samedi matin 30 septembre, à l’invitation de Véronique Boinon, nous nous sommes retrouvés dans la nouvelle salle d’étude de l’école pour animer des ateliers d’écriture à l’ancienne, lors de l’inauguration de l’école entièrement rénovée aux normes actuelles.
La salle a été aménagée comme autrefois, avec les bureaux munis des trous pour recevoir l’encrier de porcelaine, des cartes murales et même avec un poêle à bois.
Jeunes et moins jeunes se sont lancés dans l’écriture à la plume, trouvant ou retrouvant les bons gestes pour faire les pleins et les déliés.
Tous les compagnons de la plume, sergent major, buvard et gomme, encrier et porte-plume, avait été mis à disposition. Avec beaucoup d’application et de concentration, petits et grands ont rendu des copies tout à fait acceptables.
La matinée a été aussi l’occasion d’échanges de souvenirs, certains et certaines retrouvant les sensations de leurs jeunes années dans le cadre même où ils usèrent autrefois leurs culottes sur ces bancs.
Une belle expérience qui a rencontré un large public, se succédant jusqu’en fin de matinée, avant d’être invité à suivre discours des officiels et coupure du ruban. Un buffet clôturait l’inauguration.
Jean-Louis Hebrard pour le texte, Véronique Boinon pour les photos
Un merci à Marie-Hélène Sulpice pour la photo de classe.