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Éditorial – Kronos 3, 1988

À la recherche des Amériques…

Une enquête Kronos

Mais à quoi sert de connaître, si ce n’est pour agir sur ce qui est,
agir sur ce qui sera.

René Huyghe
L’Art et l’Homme

La réputation souvent faite aux sociétés d’histoire d’être réservées à des personnes joignant à la dignité que donne l’âge et l’expérience, une érudition aussi réelle qu’ennuyeuse, peut priver ces associations de concours qui leur seraient pourtant fort utiles.

C’est précisément ce que veut éviter la Société Kronos – Archéologie, Histoire et Témoignages de l’Albanais, qui est ouverte à des hommes et des femmes de tous âges et de toutes conditions, à seule fin de découvrir, conserver et faire connaître le patrimoine légué par les générations qui nous ont précédé sur notre coin de terre savoyarde.

Dans cet esprit, Kronos entreprendra, au cours des mois à venir, une enquête sur l’aventure des Albanais qui, au siècle dernier, émigrèrent vers « les Amériques. »

Ce phénomène relativement important, qui a marqué la vie de nos bourgs et de nos villages risque, en effet, de tomber dans l’oubli. Il importe donc que sait recueillie, avant qu’elle ne disparaisse, toute une tradition orale encore vivante dans beaucoup de nos familles.

C’est pourquoi, nous demandons aux personnes susceptibles d’apporter des précisions sur cette page de notre histoire locale, de se faire connaître aux membres de notre association, qui prendront les dispositions nécessaires pour enregistrer leur témoignage.

Dans la restitution des traits et de la personnalité d’un aïeul parti « aux Amériques », tel ce Jacques Picon dont nous reproduisons « le contrat de transport », pour tenter fortune… ou plus sûrement dans l’idée de revenir un jour au pays avec un pécule suffisant pour fonder un foyer ; nous trouverons des raisons supplémentaires à notre enracinement…

Et qui sait, peut-être des réponses a quelques grands problèmes qui agitent notre temps !

Félix Levet

contratdetransport
Contrat de transport de Jacques Picon

Éditorial – Kronos 4, 1989

Nous sommes tous des héritiers

Nous sommes tous des héritiers et parfois nous ne le savons pas ou nous le savons mal.

Notre héritage s’appelle paysages, résultat du travail séculaire des hommes, constructions (de la maison paysanne aux édifices historiques) ou encore coutumes et savoir-faire.

Si nous n’y prenons garde, ce patrimoine risque de disparaître sans que nous nous en rendions seulement compte.

Pour éviter l’amnésie, maladie mortelle des sociétés sans racines, il faut maintenir la mémoire vivante.
Cette mémoire, notre société Kronos s’est employée dans ses activités et publications antérieures à la cultiver.
C’est dans cette direction que nous souhaitons aller de plus en plus. À preuve le numéro de cette année 1989 qui fait la part belle aux témoignages des femmes durant La Grande Guerre, aux souvenirs laissés par les illustres touristes de La Chambotte avant 1914, à tout ce qui se disait dans les grands rassemblements auxquels donnaient lieu les sépultures d’antan.

Il nous faudra donc approfondir la recherche et la collecte des supports de la mémoire : photographies, témoignages oraux, récits… ; tant en raison de la fragilité de ce patrimoine que parce qu’il touche à une certaine conception de l’histoire.

En effet, le document oral apporte un témoignage fait d’humanité et de vécu qui ressort rarement des documents officiels, conservés dans les archives. Il est aussi, sur certains aspects de la vie des hommes, la seule source à même de nous fournir des informations. Collecter ces témoignages, les faire connaître autour de nous, c’est être les « acteurs » de notre histoire ; les thèmes de recherche ne manquent pas : émigration aux Amériques, la vigne et le vin autrefois…

De même, la photographie doit avoir une place importante dans notre conception de l’histoire.
Quelle famille ne possède pas une « boîte de photos » ou un album pour les plus organisés. Là, se trouve la mémoire de notre région ; sur ces petits rectangles en noir et blanc on retrouvera le souvenir de l’école autrefois, des gestes de l’artisan du bois, des pratiques des paysans d’avant-guerre, du village d’avant la modernisation.

Voilà des chantiers à ouvrir, des pistes à explorer, dans la ligne de la « nouvelle histoire » ; une histoire qui ne réside pas seulement dans les faits et actes des « grands hommes » mais plutôt une histoire collective sachant replacer dans le cadre général de l’histoire nationale les gens et les choses de l’histoire locale.

Jean Louis Hebrard

Document pour connaître l'Histoire en Savoie du canton d'Albens en 1860 au canton d'Albens en 1861
Document pour connaître l’Histoire en Savoie du canton d’Albens en 1860 au canton d’Albens en 1861

Éditorial – Kronos 2, 1987

Pourquoi Kronos ?

Les premiers adhérents à la Société d’archéologie, d’histoire et de témoignages de l’Albanais ont été intrigués par le patronage de Kronos et ils aimeraient en savoir plus sur les raisons du recours quelque peu insolite, à cette incarnation allégorique du Temps.

La langue française désigne par le même terme l’état atmosphérique « le Temps qu’il fait » et la mesure de la durée des phénomènes, autrement dit la durée limitée des Êtres et des choses par opposition à l’Éternité… « le Temps qui passe ».

Le « Temps qui passe » pleinement vécu par l’homme est souvent représenté de nos jours sous les traits d’un vieillard décharné, à la barbe et à la chevelure blanche, tenant une faux symbole de la puissance destructrice et le sablier emblème de la fuite inexorable des heures ; alors que Kronos des origines apparaît dans les mythologies anciennes comme un dieu créateur allié à la puissance créatrice de Gaïa, la Terre.

C’est bien évidemment sous le parrainage de Kronos créateur que s’est placé la Société d’archéologie, d’histoire et de témoignages de l’Albanais, puisqu’elle se propose, sur un canevas chronologique et au travers des faits et événements du passé d’établir la continuité du devenir des communautés de notre région. En effet, c’est le Temps, articulation du présent entre passé et avenir, qui donne à l’Homme la faculté de choisir entre les possibilités qui s’offrent à lui pour transformer la réalité et nous savons bien qu’avant d’aller plus loin il est parfois nécessaire de regarder en arrière pour préparer l’avenir en s’inspirant des exemples du passé.

La Province de Savoie est aujourd’hui profondément intégrée dans la Nation Française mais elle garde néanmoins une identité culturelle propre due pour une large part à la communauté de destin partagée durant des siècles sous l’autorité d’une Maison princière qui lui doit son nom, avec les peuples voisins du Val d’Aoste, du Valais,des Pays de Vaud et du Genevois…

Au cœur de la Savoie historique, la nature et les hommes ont façonné l’Albanais pour lui donner les caractères spécifiques qui lui ont valu pendant un temps très court il est vrai, d’être reconnu comme une véritable entité sous le nom de Province de Rumilly.

C’est au maintien de cette identité culturelle que Kronos convie tous les Albanais non pas pour une contemplation stérile du passé mais au contraire dans une attitude dynamique tenant compte du redéploiement perpétuel des êtres et des choses tant il est vrai que :
« L’AVENIR APPARTIENT AUX PEUPLES QUI AURONT LA PLUS LONGUE MÉMOIRE »

F. Levet

Éditorial – Kronos 1, 1986

En guise d’introduction

Depuis quelques années, nous assistons à un regain d’intérêt pour l’Histoire, qui tout naturellement, suscite une plus grande curiosité pour celle de nos communautés rurales.

Ce retour aux sources est dû sans doute, pour une large part, au besoin qu’ont les individus, les groupes et les peuples de reprendre racine dans une terre familière, dans un Monde où l’uniformité devient la règle et gagne peu à peu les derniers refuges épargnés jusqu’ici par le nivellement des techniques.

L’association KRONOS, archéologie, histoire, et témoignages sur l’Albanais, n’a pas plus la prétention que le désir de réunir des historiens professionnels.
Elle fait au contraire appel à des amateurs dévoués, prêts à consacrer une partie de leurs loisirs, à retrouver le passé de notre région et à conserver, pour le transmettre, ce qui existe encore dans les modes de vie, les instruments, les bâtiments et surtout dans les traditions orales, avant qu’il n’ait disparu ou soit devenu méconnaissable.

Les résultats que nous obtiendrons seront inégaux, mais nous savons qu’en sauvant de l’oubli des éléments de notre patrimoine commun, nous aurons contribué à renforcer les liens, qui au cours des âges et au fil des générations, ont donné leurs caractères spécifiques à nos communautés bien vivantes…

Alors, nous aurons fait que KRONOS, divinité allégorique du TEMPS, ne soit pas le destructeur mais l’artisan de notre DEVENIR.

Le Président, M. Félix LEVET.